La téléconsultation, qui peinait à se développer, a connu un essor important avec la crise sanitaire. La Caisse nationale d’assurance maladie recense 19 millions de téléconsultations remboursées en 2020. En 2021, les mutualistes souhaitent donner de nouvelles perspectives aux consultations à distance dans leurs établissements. Le témoignage de Rémi Bouvier, Directeur général d’Aésio Santé.
Quel bilan 2020 dressez-vous ?
Le premier confinement a été un accélérateur. Les professionnels de santé ont été convaincus et les patients ont apprécié le maintien des soins. Pour exemple, au printemps 2020, nous avons enregistré entre 500 à 800 téléconsultations/semaine dans nos 9 centres de santé.
Quand a démarré la téléconsultation chez Aésio Santé ?
Nous avons débuté en 2015 dans nos Ehpad, avec l’assistance de nos infirmières et des aides-soignantes, pour réaliser des téléconsultations en gériatrie, dermatologie et en psychiatrie. Nos établissements sanitaires (cliniques, SSR, centres de santé) ont accompagné ce développement de la télémédecine en Ehpad, en proposant par exemple des téléconsultations douleur pour les patients souffrant de façon chronique. Nous avons également effectué un test dans l’une de nos pharmacies.
Quel est l’usage aujourd’hui dans vos établissements ?
Le médico-social, qui a été précurseur dans ce domaine, est aujourd’hui rattrapé par le sanitaire. Des téléconsultations sont réalisées par des médecins mutualistes dans les centres de santé et les cliniques, pour le suivi des patients, les consultations préopératoires avec les anesthésistes…
L’usage est étendu à presque toutes les disciplines et nous travaillons avec de plus en plus de médecins libéraux ou hospitaliers pour le suivi des résidents des établissements médico-sociaux.
De quel équipement disposez-vous pour les téléconsultations ?
Dans nos Ehpad, les téléconsultations se font avec des charriots de télémédecine équipés d’outils connectés (caméra à main avec fonction dermatoscope et laryngoscope, otoscope, échographe, stéthoscope). Aesio Santé a choisi le logiciel Télémédica développé par Hopi Médical pour proposer des téléconsultations aux personnes âgées.
Téléconsultation en dermatologie
Quels sont les autres investissements réalisés ?
Depuis l’an dernier, nous équipons tous nos Ehpad en accès Wifi. Cela nous permet de réaliser des téléconsultations directement dans les chambres des résidents et plus uniquement dans une salle dédiée.
L’accès Internet est parfois compliqué. Nous sollicitons les maires et les parlementaires car le déploiement de la fibre optique dans certaines communes n’est pas prévu pour les établissements médicaux.
Quelles sont vos priorités en 2021 ?
Nous avons trois priorités pour développer les usages de la téléconsultation :
Dans le cadre du maintien de l’autonomie, nous souhaitons transformer nos Ehpad en centre de ressources gériatriques et assurer les téléconsultations des personnes âgées qui vivent à proximité. Quand la crise sanitaire sera passée, nous envisageons de lancer ce projet dans nos Cités des aînés à Saint-Etienne, Montpellier et Valence.
Par ailleurs, la téléconsultation n’est pas encore très développée dans les établissements mutualistes pour personnes handicapées. Nous souhaitons utiliser les consultations à distance pour faire de la prévention. Les établissements sont en cours d’équipement.
Enfin, dans les zones touchées par la désertification médicale, les patients pourraient se rendre dans des centres de santé entièrement dédiés à la téléconsultation en étant pris en charge par des infirmières. Nous expérimentons un dispositif en Haute-Loire, sur un territoire rural, dans une pharmacie.
Au niveau du personnel des établissements mutualistes, avez-prévu des formations ?
Oui, toutes les infirmières de nos établissements mutualistes seront formées cette année pour pouvoir assister un professionnel de santé à distance.
Quels sont vos souhaits pour continuer à développer la téléconsultation ?
La téléconsultation offre de nombreuses perspectives. Toutefois, une réforme de l’organisation sanitaire est nécessaire. Les prises en charge médicales ne s’effectuent plus sur un mode conventionnel. A cet effet, avec le think tank Matières grises, nous avons édité un livre blanc sur la téléconsultation en Ehpad.
Sur le terrain
Eric Jacquet, chirurgien digestif à la Clinique Beau Soleil à Montpellier, établissement géré par Aésio Santé :
J’ai recours à la téléconsultation pour des suivis post-opératoires ou après un cancer. Cela représente 10% de mes consultations. Ainsi, des patients âgés, qui habitent loin, n’ont pas à se déplacer. Par ailleurs, en cette période de crise sanitaire, cela permet à des « cas contact COVID » de conserver leur rendez-vous. Des confrères gynécologues ou urologues utilisent également la télémédecine en cas de demandes urgentes de patients ce qui permet d’établir un diagnostic rapide.
Plusieurs complémentaires santé, ont noué des partenariats avec des plateformes de téléconsultation. Elles proposent à leurs assurés un service de téléconsultation inclus dans leur contrat santé.