Taxe Covid : une mauvaise réponse
Les mutuelles ont toujours indiqué vouloir contribuer à la situation exceptionnelle générée par l’épidémie de COVID-19 ; mais la taxe est une mauvaise réponse à une bonne question. Ce n’est qu’en 2021 que pourront se mesurer les impacts de cette crise sanitaire et de la crise économique redoutée : rattrapage des soins, impayés des cotisations liés à la fragilisation de nombreuses entreprises, maintien des garanties santé et prévoyance pour les personnes privées d’emploi (portabilité). En outre, la Mutualité Française pointe une rupture d’égalité devant les charges publiques, dans la mesure où seuls les Français couverts par une assurance maladie complémentaire sont mis à contribution pour financer le régime général de la Sécurité sociale. Alors que les dépenses de santé augmentent de manière exceptionnelle de +7,6 % en 2020 et pourraient progresser encore de +3,5 % en 2021, la trajectoire de retour à l’équilibre devra nécessairement faire appel à d’autres sources de financements.
Thierry Beaudet, Président de la Mutualité Française, souligne : « La crise a conforté le rôle de notre assurance maladie, construite sur un modèle partenarial entre les régimes de base et les assureurs complémentaires. La mobilisation rapide de ses ressources financières, et de ses salariés, a permis aux plus fragiles d’entre nous, d’affronter une situation sanitaire et économique difficile. Ne fragilisons pas ce modèle. C’est pourquoi très vite nous avons proposé de rembourser la part que le Sécurité sociale a avancée et qui relève de l’Assurance maladie complémentaire ». « Mais nous pouvons également nous étonner que seuls les organismes complémentaires à l’assurance maladie soient appelés à apporter une contribution exceptionnelle, alors que d’autres acteurs, dans d’autres secteurs que l’assurance, ont réalisé des bénéfices records pendant la crise. »
Le système de santé a besoin d’investissement massif pour se transformer
Dans le cadre des conclusions du « Ségur de la santé », le budget proposé par le Gouvernement présente un plan d’investissement de 19 Mds€ dans les établissements de santé et médico-sociaux. Il s’agit en réalité essentiellement de la reprise de dette des hôpitaux, soit 13 Mds€. La Mutualité Française regrette que le système de santé, qui mérite pourtant un plus haut niveau d’investissement, ait été en partie oublié dans le plan de relance annoncé par le ministre de l’Économie. Elle souhaite par ailleurs un engagement clair du Gouvernement sur la répartition équitable de ces 6 Mds€ entre l’ensemble des acteurs de soins (publics, privés, privés non lucratifs).
Une stratégie de test incompréhensible
L’ONDAM 2021 annonce une provision au titre des tests, vaccins et masques s’élevant à 4,3 Md€. Or, si l’incertitude pèse sur les besoins réels au regard de la situation, la gestion des masques, puis des tests par le Gouvernement n’a pour le moment pas démontré toute son efficacité.
Thierry Beaudet, Président de la Mutualité Française relève : « Au regard du coût des tests et de leur efficacité, nous pouvons nous interroger sur la pertinence de la stratégie mise en œuvre. A ce rythme, les tests auront coûté 1,4 milliard en 2020, alors que les temps d’attente des résultats pour les Franciliens par exemple s’élèvent parfois jusqu’à 15 jours. »
Une 5e branche, non financée à ce jour
La Mutualité Française salue la création, avec le PLFSS 2021, de la cinquième branche de Sécurité sociale consacrée à l'autonomie. Elle regrette cependant que des financements concrets ne soient toujours pas avancés et la loi sur l’autonomie soit à nouveau repoussée à l’année prochaine. Le nombre de personnes âgées en situation de perte d’autonomie devrait doubler d’ici à 2040, pour atteindre 2,6 millions. Les pouvoirs publics doivent être plus ambitieux. Les recettes annoncées à ce jour ne sont pas suffisantes pour répondre au besoin de financement identifié par plusieurs rapports successifs à 10 milliards par an d’ici 2030 pour le seul grand-âge. La Mutualité Française a fait plusieurs propositions au Gouvernement pour y faire face.
Prise en charge intégrale des actes de téléconsultation
La prise en charge intégrale des actes de téléconsultation médicale par l’Assurance maladie obligatoire est prolongée pour deux ans. Si cette disposition était entendable en phase aigüe de la crise sanitaire, rien ne justifie cette prolongation : les complémentaires santé peuvent parfaitement financer leur part des téléconsultations comme les consultations traditionnelles avec le circuit Sesam-Vitale. Pour pratiquer le tiers payant sur la part complémentaire d’une téléconsultation, les services en ligne des complémentaires santé sont déjà disponibles. Une meilleure coordination entre les complémentaires, les plateformes de téléconsultation et l’Assurance Maladie permettrait de les déployer rapidement.
Réforme de la tarification hospitalière : l’importance de réduire le reste à charge
Si le report de la réforme de la tarification hospitalière est compréhensible dans le contexte actuel, la Mutualité Française rappelle la nécessité de réduire le reste à charge à l’hôpital, variable d’un établissement à l’autre et pénalisant les personnes âgées dont les séjours sont généralement les plus longs. Un constat que soulignait l’observatoire de la Mutualité Française publié l’année dernière. La Mutualité Française avait proposé à cette occasion de forfaitiser les restes à charge en les déconnectant des motifs d’hospitalisation et des durées de séjour.
Concernant le forfait « urgences » prévu à l’article 28, sur la forme, la Mutualité Française déplore de découvrir cette nouvelle mesure à la lecture du projet de loi, sans aucune concertation préalable. D’autant que le flou du dispositif ne permet pas à ce stade de comprendre la réalité de la mesure. Sur le fond, la Mutualité Française pourrait soutenir un projet tenant compte de l’enjeu majeur des restes à charge et du besoin de lisibilité pour les patients.
Suppression du fonds CSS, financé à 100 % par les complémentaires santé
La Mutualité Française prend acte de la suppression du fonds de la complémentaire santé solidaire (Fonds CSS), financé à 100 % par les complémentaires. Cependant, tout en soulignant la volonté de simplification affichée par cette mesure, la Mutualité Française doute de sa capacité à atteindre son objectif, ceci dès lors que les missions sont réparties entre trois entités : le ministère des Solidarités et de la Santé, la CNAM et l’ACOSS. Auquel cas, cette réforme de simplification risque dans les faits de compliquer le système et enlever de la lisibilité mais aussi de la transparence.
Des avancées concrétisées
La Mutualité Française salue en revanche un certain nombre de mesures parmi lesquelles la traduction des négociations du « Ségur de la santé » sur la revalorisation des professionnels des hôpitaux et des Ehpad à hauteur de 8,8 Mds€ et l’inscription au budget 2021 de la Sécurité sociale du doublement du congé paternité, qui représente une avancée concrète pour l’égalité femme-homme et le bien-être des enfants.
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À propos de la Mutualité Française
Présidée par Thierry Beaudet, la Mutualité Française fédère la quasi-totalité des mutuelles en France. Elle représente 540 mutuelles dans toute leur diversité : des complémentaires santé qui remboursent les dépenses des patients, mais aussi des établissements hospitaliers, des services dédiés à la petite enfance et des crèches, des centres dentaires, des centres spécialisés en audition et optique, des structures et services tournés vers les personnes en situation de handicap ou les personnes âgées.
Les mutuelles interviennent comme premier financeur des dépenses de santé après la Sécurité sociale. Avec leurs 2 800 services de soins et d’accompagnement, elles jouent un rôle majeur pour l’accès aux soins, dans les territoires, à un tarif maîtrisé. Elles sont aussi le 1er acteur privé de prévention santé avec plus de 8 000 actions déployées chaque année dans toutes les régions.
Plus d’un Français sur deux est protégé par une mutuelle, soit 35 millions de personnes.
Les mutuelles sont des sociétés de personnes à but non lucratif : elles ne versent pas de dividendes et l’intégralité de leurs bénéfices est investie en faveur de leurs adhérents. Régies par le code de la Mutualité, elles ne pratiquent pas la sélection des risques.
Présidées par des militants mutualistes élus, les mutuelles représentent également un mouvement social et démocratique, engagé en faveur de l’accès aux soins du plus grand nombre.