Présidentielle 2017 : lancement de PlacedelaSanté.fr, un site participatif pour décrypter les programmes et interpeller les candidats
08 décembre 2016En présence des think tanks partenaires (la Fondapol, la Fondation Jean-Jaurès et Terra Nova), Thierry Beaudet, président de la Mutualité Française, a présenté PlacedelaSanté.fr, ses objectifs et ses fonctionnalités, jeudi 1er décembre au Numa.
« Brexit, élections américaines... difficile de ne pas voir dans ces événements une déconnexion entre les préoccupations des dirigeants et des électeurs. Et à ce jour, rien ne montre que les véritables préoccupations des Français seront au cœur des débats électoraux », analyse Thierry Beaudet. Comme l'a relevé un récent sondage (1), si la santé et la protection sociale font bien partie de ces sujets d'attention, ces thèmes sont aujourd'hui finalement assez peu présents dans la campagne présidentielle, ou alors de façon polémique.
Décrypter les programmes
Afin de remettre ces enjeux au centre des débats, la Mutualité Française lance PlacedelaSanté.fr. L’objet de ce site participatif est d’explorer ces enjeux, de décrypter les programmes en matière de santé ou de protection sociale et d’interpeller les candidats à l’élection présidentielle. Les think tanks partenaires (la Fondapol, la Fondation Jean-Jaurès et Terra Nova) apporteront leur vision et leur analyse sur ces sujets. Ouvert à tous, le site propose aux internautes de contribuer, en commentant les contenus, en postant leurs tribunes ou en interpellant les candidats.
A l’occasion de la présentation du site, Thierry Beaudet a livré les premiers éléments chiffrés de décryptage des programmes des candidats déjà déclarés. « L’idée n’est pas de prendre position pour tel ou tel candidat, mais bien de contribuer à nourrir les débats et éclairer les véritables choix de société qu’impliquent certaines propositions. »
20 milliards d'euros : c’est l’économie qui serait réalisée par la Sécurité sociale si, comme le propose François Fillon, l’assurance maladie se concentrait sur le remboursement des affections graves ou de longue durée (le reste étant remboursé par les patients ou leurs complémentaires) (2). Cela permettrait, avec le retour à l’équilibre de la Sécurité sociale, une baisse de 15,6 milliards d’euros soit de la dette sociale (qui passerait de 120,9 milliards d’euros à 105,3 milliards d’euros), soit des prélèvements obligatoires (dont le taux passerait de 44,5% à 43,8% du PIB).
Mais 20 milliards d’euros, c'est aussi la somme supplémentaire que les ménages ou leurs complémentaires santé devraient alors prendre à leur charge. Ce coût supplémentaire représenterait 300 euros par personne et par an, soit 1 200 euros pour un couple avec deux enfants.
2,7 milliards d’euros (3) : c’est la somme que les Français devraient avancer lors de leur consultation chez le médecin si le tiers payant généralisé était supprimé, proposition portée par Les Républicains. Cela représenterait 41 euros par personne et par an, et 165 euros pour un couple avec deux enfants. Cette somme pourrait atteindre 10,8 milliards d’euros si le projet consistait à supprimer le tiers payant pour l’ensemble des professionnels de santé (pharmaciens, infirmiers… et pas seulement les médecins). Cela représenterait alors 163 euros par personne et par an, soit 652 euros pour un couple avec deux enfants.
0,4 % : c’est le poids de l’aide médicale d’Etat (AME) (4) dans les dépenses de santé (qui s’élèvent à 195 milliards d’euros). Cela représente 765 millions d’euros (dont 40 millions au titre des soins urgents). Il est difficile d’évaluer l’économie potentielle, si, tel que le suggèrent plusieurs partis (Les Républicains, le Front national), ce dispositif était supprimé et remplacé par une aide médicale temporaire pour les urgences sanitaires et les maladies contagieuses. En effet, dans la mesure où une consultation médicale, voire une analyse, reste le préalable indispensable à la détection d’une maladie contagieuse, la distinction entre urgences sanitaires et soins courants, s’avère complexe.
42,4 milliards d’euros : ce sont les dépenses de santé que les ménages n’auraient plus à financer soit directement, soit via leur complémentaire santé, si, comme le propose Jean-Luc Mélenchon, l’Assurance maladie devait rembourser 100 % des dépenses de santé. En moyenne, cela représente 638 euros par an et par personne, soit 2 553 euros pour un couple avec deux enfants.
Mais 42,4 milliards d’euros, c’est aussi la somme supplémentaire que devrait prendre en charge l’assurance maladie. Le financement de cette mesure nécessiterait une augmentation de 638 euros par personne des prélèvements obligatoires dont le poids dans le PIB passerait de 44,5 % (en 2015) à 46,4 %. Il faudrait augmenter, par exemple, de 45 % les taux de CSG, ce qui conduirait à une hausse du taux de CSG sur les salaires de 7,5 % à 10,9 %.
En l’absence de source de financement supplémentaire, le déficit de la Sécurité sociale se creuserait de 42,4 milliards d’euros, soit un niveau jamais égalé (5). Et si ce déficit était transféré à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), alors le montant de la dette passerait de 120,9 milliards d’euros à 163,3 milliards d’euros, soit une augmentation de 35 %. Afin de ne pas alourdir le poids qui pèse sur les générations les plus jeunes, la loi organique relative aux lois de financement de la Sécurité sociale oblige, dans ce cas, à augmenter les ressources de la Cades pour que la dette reste entièrement remboursée à l’horizon de 2025, ce qui conduirait à l’augmentation des prélèvements obligatoires décrite ci-dessus.
2,8 milliards d’euros : c’est l’économie promise par Jean-Luc Mélenchon aux patients si les dépassements d’honoraires des médecins étaient supprimés. Cela représenterait une économie de 43 euros par personne et par an, et, pour un couple avec deux enfants, de 171 euros. Pour l’ensemble des médecins, cette abolition des dépassements d’honoraires se traduirait par une baisse de 14 % de leurs revenus (cette baisse pouvant atteindre 40 % pour certains spécialistes).
Interpeller
Ce travail de décryptage se poursuivra tout au long de la campagne présidentielle, au fil des propositions des candidats en matière de santé et protection sociale.
Fin février, lors d’un événement dédié, la Mutualité Française interpellera, avec ses partenaires, les candidats à l’élection présidentielle, se faisant ainsi le porte-parole des préoccupations des Français autour de la santé et de la protection sociale.
(1) Source : Baromètre Santé 360 d’Odoxa - novembre 2016.
(2) Simulation fondée sur le scénario suivant : la Sécurité sociale couvre les dépenses hospitalières et les dépenses qui relèvent du régime des ALD, mais cesse de rembourser les soins en ville pour les dépenses qui ne relèvent pas de ce régime.
(3) Ce chiffre concerne le tiers payant complémentaire, c’est-à-dire les sommes remboursées par l’ensemble des complémentaires santé. Il ne comprend pas les sommes remboursées par l’assurance maladie.
(4) L’AME prend en charge les soins des personnes étrangères en situation irrégulière, résidant en France depuis plus de trois mois, et dont les ressources sont inférieures au plafond de revenus fixé pour l’accès à la CMU-C.
(5) Au plus fort des conséquences de la crise des subprimes sur les comptes sociaux, en 2010, le déficit du régime général de la Sécurité sociale (y compris fonds de solidarité vieillesse) avait atteint 28 milliards d’euros.
A propos de la Mutualité Française
Présidée par Thierry Beaudet, la Mutualité Française fédère la quasi-totalité des mutuelles en France. Elle représente 650 mutuelles dans toute leur diversité : des complémentaires santé qui remboursent les dépenses des patients, mais aussi des établissements hospitaliers, des services dédiés à la petite enfance et des crèches, des centres dentaires, des centres spécialisés en audition et optique, des structures et services tournés vers les personnes en situation de handicap ou les personnes âgées…
Les mutuelles interviennent comme premier financeur des dépenses de santé après la Sécurité sociale. Avec leurs 2 600 services de soins et d’accompagnement, elles jouent un rôle majeur pour l’accès aux soins, dans les territoires, à un tarif maitrisé. Elles sont aussi le 1er acteur privé de prévention santé avec plus de 7 000 actions déployées chaque année dans toutes les régions.
Plus d’un Français sur deux est protégé par une mutuelle, soit 35 millions de personnes.
Les mutuelles sont des sociétés de personnes à but non lucratif : elles ne versent pas de dividendes et l’intégralité de leurs bénéfices est investie en faveur de leurs adhérents. Régies par le code la Mutualité, elles ne pratiquent pas la sélection des risques.
Présidées par des militants mutualistes élus, les mutuelles représentent également un mouvement social et démocratique, engagé en faveur de l’accès aux soins du plus grand nombre.